dimanche 19 mai 2013

"Je crois à la résurrection de la chair."

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Philippe DARANTIERE, Pour une action politique catholique. La stratégie du levain dans la pâte, Editions de Paris, Versailles, 2005, pp. 28-37.

 Le Christ n'a pas confié la direction de la cité à son Eglise. Mais il a révélé aux hommes la source du pouvoir politique: elle est en Dieu... De cette révélation, la cité chrétienne a tiré deux bienfaits.
Le premier est le principe de transcendance: puisque tout pouvoir vient de Dieu, la légitimité du temporel relève de sa soumission à l'ordre divin...
Le second principe politique qu'enseigne le Christ est la séparation des pouvoirs temporels et spirituels.. C'est au contraire un principe évangélique. Comme tel, il est inséparable de la Rédemption, et se relie donc au premier principe de transcendance.
La reconnaissance de l'Eglise par le pouvoir temporel romain n'est pas vécue comme un aboutissement mais comme un point de départ. L'Eglise a reçu la mission de « tout renouveler dans le Christ », et l'organisation des hommes en société ne doit pas échapper à cet impératif missionnaire. .. Benoît de Nursie, fils de patricien, élabore la règle de vie chrétienne qui sera durant des siècles l'instrument privilégié de l'évangélisation. Les moines réalisent en effet une société chrétienne idéale, sous la règle du travail et de la prière, dans l'obéissance à un abbé qui tient la place de Dieu, et dans une charité mutuelle qui tend entièrement à célébrer la gloire de Dieu. En deux siècles encore, cet idéal de société chrétienne aura essaimé dans tout le monde connu, gagnant à la foi les plus farouches rois barbares..
C'est en fondant l'exercice de l'autorité publique sur l'autonomie du politique dans la sujétion à la Vérité révélée que la chrétienté va s'organiser au sortir de l’empire romain..
Eclairée par l'enseignement de l'Eglise, l'autorité politique de l'époque poursuit une mission, qui est d'assurer le Bien Commun. C'est en effet parce que toute la création est ordonnée à Dieu que l'organisation des hommes en société doit permettre, favoriser et parfois faire épanouir les vertus chrétiennes dont l'exercice ici-bas assure à l'homme le salut éternel. La vocation du politique est simple: créer, au moyen de la loi, l'ordre en vue du bien commun. Le principe de l'origine divine du pouvoir impose que sa pratique tende au bien voulu par Dieu. Il est même du devoir des responsables politiques de réaliser les conditions du bien commun: la paix, la justice, la protection des faibles, etc. Cette doctrine du bien commun va devenir la pensée politique de l'Eglise... Tout cela se réalise dans l'autonomie de la sphère politique, conçue comme un aspect de la vie morale. L'Eglise ne privilégie en cela aucun régime: les républiques et les monarchies coexistent au Moyen Age... le prince chrétien.. il n'est que le dépositaire du bien qui lui est confié par sa naissance. C'est tout le sens de l'expression: « Le Christ, Roi de France, le roi, vicaire du Christ ». Le pouvoir est une charge, un service. Chaque roi en rend compte à Dieu dans le secret de sa vie spirituelle.
.. Machiavel. Tirant des leçons de l'effacement de la notion de bien commun, il inaugure la notion de rapport de force comme instrument principal de l'exercice du pouvoir. La sécularisation de la société est en route.
Malgré l'essor religieux prodigieux que provoque le Concile de Trente, la sécularisation de la société va se poursuivre tout au long du XVII° siècle, à mesure qu'évolue la doctrine du pouvoir.
Pour les Lumières, l'homme naît fondamentalement libre. Séparé des autres, il entretient des relations d'autonomie et d'égalité formelle avec eux. Comme sa liberté ne peut être limitée que par celle du voisin, il est naturellement conduit à s'organiser en société, pour codifier d'un commun accord l'usage respectif que l'un et l'autre feront de leur liberté. C'est le « contrat social ». Il n'est plus question d'une organisation sociale fondée sur l'unité de nature du genre humain, ordonnée au bien commun comme une condition favorable au salut des âmes. La raison rejette « à la fois le principe d'autorité et celui de finalité ». La loi n'est plus qu'une convention, une règle du jeu librement établie par les parties, et révocable par elles. Le seul fondement de la loi est la volonté populaire. Affranchie de son origine divine, l'autorité de la raison peut se donner à elle-même sa finalité: le bonheur de l'humanité par le progrès des sciences et des techniques. La nature peut et doit être maîtrisée pour que l'homme profite de ses bienfaits. Pour cela, il convient d'abolir les privilèges et les corporations, afin que chacun puisse librement épanouir ses talents au profit de tous. Cette utopie matérialiste va directement inspirer la Révolution française.

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